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Bleu un jour, Bleu (pas) toujours : Jean-Marc Aué, 1998

Bleu un jour, Bleu (pas) toujours : Jean-Marc Aué, 1998

Publié le 24/11/2010

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Le groupe France lors du grand Chelem 1998

Quand avez-vous appris votre sélection pour le match France-Pays de Galles qui a eu lieu le 5 avril 1998 ? Avez-vous été surpris par cette annonce ?

Je n'en ai pas le souvenir exact. Je crois que c'est mon coach, Thierry Merlos qui me l'a appris…On ne peut pas dire que j'ai été réellement surpris car j'avais déjà été remplaçant pour le match contre l'Irlande. J'avais également réalisé de bonnes performances lors des matchs avec l'équipe de France A contre l'Ecosse et l'Angleterre. Puis je réalisais une bonne saison avec le club. J'étais donc dans les papiers des entraîneurs, j'espérais simplement être appelé.



Selon vous pourquoi étiez-vous retenu à ce moment-là ?

Je pense que j'ai réussi à me démarquer lors des matchs de l'équipe de France A. Je faisais preuve de régularité et de solidité. J'étais un joueur qui correspondait aux schémas de jeu, j'étais dans l'esprit des sélectionneurs. Je produisais du jeu et j'étais en mouvement. Je répondais donc aux attentes de Jean-Claude Skrela, Pierre Villepreux et Jo Maso.



Quels ont été vos sentiments à ce moment-là ?

Je pense comme tout joueur qui se voit offrir une telle récompense, j'étais très fier. Sur l'instant, tu sais que tu vas porter le maillot de ton pays, tu vas représenter la France et ça c'est incroyable. C'est un rêve qui se réalise.



Comment s'est déroulée votre insertion en équipe de France ?
Le rassemblement était organisé au Château Ricard (à l'époque Marcoussis n'existait pas et l'équipe de France était réunie au Château-Ricard à Clairefontaine, NDLR). J'y allais sur la pointe des pieds car je n'étais pas habitué. J'étais dans l'observation. Il y avait beaucoup de respect avec mes coéquipiers. J'essayais de profiter à fond du moment présent, car on sait que ça peut s'arrêter à tout moment.




Comment avez-vous vécu votre entrée sur le terrain avec le maillot des bleus ?


La première chose qui m'a frappée, c'était le stade. Oui, on a eu la chance de jouer à Wembley car le stade de Cardiff était en travaux. Alors même si le stade est connu pour impressionner tous les footballeurs, j'étais émerveillé. Les vestiaires étaient très vieux, rustres, mais la pelouse et les tribunes étaient magnifiques.



Quel souvenirs avez-vous conservé du match ?

J'étais remplaçant. Je suis rentré dix minutes avant la fin du match (à la place de Christophe Lamaison, NDLR). A ce moment-là, quand l'arbitre s'approche de toi pour te dire que tu vas rentrer, tu penses à ta famille et tes amis. Tu es fier d'être là pour eux.



Qu'avez-vous retenu de votre performance ?

J'étais plutôt satisfait de ce que j'avais réalisé. Ce n'est jamais facile de rentrer en fin de match, il faut immédiatement s'imprégner de ce qu'on a vu à l'échauffement. Mais j'ai eu le temps de plaquer à plusieurs reprises. Puis sur l'essai final de Xavier Garbajosa, j'ai quand même réussi à toucher trois fois le ballon. J'avais donc rempli ma mission. Sans compter qu'au moment où je fais une faute au sol sur un Gallois, une erreur que l'on peut justifier par un excès d'envie, je me fais marcher dessus. Stéphane Glas, en bon coéquipier vient me défendre, et prend un carton jaune à ma place. J'ai donc peu joué mais j'ai été très réactif. (Rires)

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Jean-Marc Aué avec Castres face à Toulouse

A quoi pensiez-vous au moment du coup de sifflet final ?

C'était la fin du Tournoi des V Nations. C'était la fin d'une période. J'étais heureux, satisfait. J'ai eu la chance, comme je dis souvent, de tout connaitre en un rien de temps. Un score inégalé à l'extérieur dans un tournoi du grand Chelem (la France s'impose contre le Pays de Galle sur un score de 51 à 0, NDLR). Une sélection, une victoire en grand Chelem. En dix minutes, j'ai tout gagné !



Comment s'est déroulée la suite pour vous ?

J'ai participé à la tournée Argentine-Fidji en 1999. Puis, il a eu un changement d'équipe. L'ère Bernard Laporte a commencé. Chaque coach a ses schémas, et les joueurs qui y correspondent. Je ne rentrais plus dans le cadre. Je me doutais que je ne serais plus sélectionné. Alors même si on est déçu en tant que joueur de ne plus être appelé, je ne l'ai pas mal vécu. Il y a un temps pour tout et pour tous !



Que vous a apporté cette sélection ?

Le fait d'être International vous projette un peu plus dans la lumière. Vous devenez un peu plus connu et reconnu. Il y a un impact important, on parle plus de vous. Vous dégagez une image sympa pour les gens, et ce n'est pas déplaisant même si je suis loin de tout ce qui est paillettes. Sur le plan sportif, le fait d'avoir ce statut ouvre des portes.



Avez-vous gardé un objet de cette période ?

Je ne suis pas quelqu'un de nostalgique, je n'ai donc pas pour habitude de conserver toutes les choses qui se rapportent à une époque révolue. Cela dit, j'ai quand même conservé la Une de l'Equipe on est tous en train de célébrer la victoire du Tournoi des V Nations et que l'on tient la Coupe du grand Chelem.



Avez-vous des contacts avec vos anciens coéquipiers ?

Oui, quand on se croise on est toujours content de se revoir. Mais on n'est pas là à ressasser le passé, peut-être parce que ce n'est pas encore assez vieux. On sait qu'on a vécu une même histoire. Mais je n'en parle pas trop. Je préfère rigoler avec eux autour d'une petite bière.



Quels sentiments ressentez-vous en regardant les matchs ? Et quand vous entendez la Marseillaise ?

Je dois avouer qu'entendre la Marseillaise me donne toujours des frissons. Je me dis que j'y étais. C'est vraiment un moment particulier.



Comment vivez-vous ces moments en tant que spectateur ?

Ça peut paraître étonnant mais je suis un spectateur très zen, pacifique. Je suis très objectif, j'ai du mal à me laisser dépasser par les évènements. Mais ça n'enlève rien au fait que je reste le premier supporter de la France.



Vous considérez-vous comme International ?

On dit qu'une fois qu'on a été International, on l'est à vie. Je crois que c'est vrai. C'est une image qui vous suit partout. Puis c'est rare, tout le monde ne l'est pas. Mais cela n'a pas changé ma vie pour autant. J'ai juste vécu cette nouvelle dimension de manière égoïste, c'est une satisfaction personnelle que je garde pour moi.



Observez-vous des différences entre l'équipe de France d'il y a dix ans et l'équipe de France d'aujourd'hui ?

Il y a une différence frappante sur le physique des joueurs. Il y a eu une évolution de jeu : les défenses ont pris le pas sur les attaques. Il s'agit plus d'un rugby de pénétration que de contournement. Avant, un pilier qui rattrapait un ailier c'était parce que ce dernier refaisait son lacet ou attendait le soigneur… C'est pourquoi, on demande aux jeunes joueurs de commencer la musculation, la préparation physique beaucoup plus tôt. A 18 ans, les jeunes sont pros, ce qui n'existait pas il y a une dizaine d'années.

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