Publié le 09/12/2011
Sur le terrain, Mathieu Blin n'était pas du genre à porter un casque, mais plutôt à en mettre un coup de temps en temps, et à se relever groggy assez souvent. « Je me souviens d'un match de Coupe d'Europe où je m'assomme au cours d'une entrée en mêlée, témoigne l'ancien talonneur du Stade Français dans le cadre de la présentation du travail de la commission médicale de la LNR, présidée par le Dr Jean-Claude Peyrin au sujet des commotions cérébrales. Je me relève et tout va bien physiquement, mais plus tard je me suis senti perdu, avec le sentiment d'avoir raté les fêtes de Noël, l'anniversaire de mon frère, etc. Or, on était en octobre… » Un vrai moment de solitude vécu un terrain de rugby à la suite d'une commotion cérébrale qui peut survenir après un coup à la tête, mais pas forcément. Elle est la conséquence de forces d'inertie dans le cerveau générées lors de mouvements très rapides de la boîte crânienne.
« Le danger de la commotion cérébrale, c'est que le joueur n'a pas le sentiment de subir quelque chose de grave, explique le triple champion de France (2003, 2004, 2007). Et dans le rugby on va se relever de suite, montrer que tout va bien, qu'on est un guerrier, qu'on peut tenir son poste coûte que coûte. » Mais le danger de sur-blessure est alors évident avec un joueur qui n'est plus à 100% de ses capacités. « Il est important de prendre conscience de l'existence de la commotion cérébrale, et du danger de leur répétition au cours d'une carrière », poursuit Florian Ninard (La Rochelle) qui, au sein de Provale est en charge du domaine médical. « Tout joueur a été confronté à une commotion cérébrale, ce qu'on appelle un KO. Pendant des décennies on a minimisé l'importance de cette blessure du cerveau. Soit pour ne pas se priver d'un joueur pendant un temps défini, soit parce que celui-ci se relevant sans trop de difficultés, on n'avait pas le sentiment d'avoir subi un choc si important que cela. » Devenu un métier à part entière avec la mise en oeuvre d'une convention collective, le statut de rugbyman professionnel nécessite la vraie prise en charge au sein d'une médecine dédiée. « La pratique du rugby a des contraintes importantes sur notre corps. La prévention et la prise en charge permettent de garantir une sécurité au joueur assurant aussi sa rentabilité sportive, et donc économique, et lui permettant d'avoir une carrière plus longue », conclut-il.
Pour Mathieu Blin et Florian Ninard, « le médical est au cœur de la vie du sportif et l'a toujours été. De l'éponge magique à la cryogénie, le staff médical a toujours soigné les maux du corps et de l'âme. Les présidents de clubs, les entraîneurs sont de plus en plus réceptifs à la nécessité d'avoir une équipe médicale importante car l'intérêt du joueur est aussi le leur ». Grâce au Professeur Philippe Decq, les équipes de France de jeunes et féminines ont déjà été sensibilisées à la nécessité de ne pas mésestimer les conséquences des commotions cérébrales. « Un joueur n'a pas le droit de taire qu'il a eu une commotion cérébrale, appuie Mathieu Blin. Les médecins doivent respecter le protocole et ils sont les seuls habilités à pouvoir dire qui est apte au jeu ou pas. » Pour les commotions cérébrales, des spécialistes (neurochirurgiens et neurologues) extérieurs au club, formés et sensibilisés à ce problème, seront les référents des clubs et des joueurs pour faire les premiers examens et assurer leur suivi. Pour être bien certain, qu'après un KO, tout soit OK…