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François Piazza, dit " Padre", la mémoire du rugby à Compiègne

François Piazza, dit " Padre", la mémoire du rugby à Compiègne

Publié le 10/02/2012

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François Piazza, distillant les anecdotes devant les photos des équipes du RCC qui se sont succédées pendant un peu plus de 100 ans.

Il est des personnages qui marquent les esprits. Pourtant dans son imperméable et sous sa casquette bien vissée sur la caboche, François Piazza passerait presque inaperçu, pas plus en tout cas qu'un autre homme de 83 ans, venu sur les bords du stade Félix Jouve – Maurice Senez de Compiègne, pour un après-midi en compagnie des gamins du cru. Mais à journée exceptionnelle, les Ambassadeurs du rugby pro étant de passage dans l'Oise, homme exceptionnel. « El Padre », comme l'appelle tout le monde ici, n'est pas seulement le papy sympathique qui observe et analyse les gestes de chacun, il est bien plus. Historien du club, il est la mémoire, la science de ce club qui a fêté son centenaire en 2006.

Calé dans une arrière salle, au calme, à l'abri du froid et du bruit, l'homme se met à l'aise, sort ses archives et commence à me raconter l'histoire de ce club qui coule dans ses veines. Pourtant, à l'origine, rien ne le destinait à cela. Natif d'Internepo, de la commune de Bordano, un petit village des Dolomites en Italie, François Piazza aurait logiquement pu se diriger vers le ballon rond, véritable religion dans la botte. Pourtant il avance un début d'explication : « Je ne sais pas si cela a fait pencher la balance, mais le coin d'où je viens en Italie est le berceau transalpin du rugby. C'est juste au-dessus de Venise, et il y a notamment des clubs comme Trévise ou Rovigo qui sont parmi les meilleurs du pays ». Sûrement, mais pas seulement.

Jacky Savariego, le moteur

A son arrivée en France, à Compiègne, en 1938, il est alors âgé de 8 ans et demi mais ne présente toujours pas d'accointance avec ce ballon aux rebonds si capricieux. Suivant son père, sa mère étant restée de l'autre côté des Alpes et qu'il ne reverra qu'à dix-huit ans, il part à Paris en 1944, où il fait ses premiers pas dans le rugby au CASG. Les prémices d'une belle histoire d'amour… avant un véritable coup de foudre. En 1945, il revient à Compiègne avec son père, et c'est la révélation, grâce à une valeur forte de ce sport, la camaraderie. « Lorsque je suis arrivé à Compiègne, j'ai rencontré Jacky Savariego, une légende ici, qui jouait en équipe première à 15 ans. Cela a été la révélation, il a été le moteur de mon histoire avec le rugby. Il m'a dit viens jouer tu verras… et vous voyez, près de 70 ans plus tard, je gravite toujours autour ».
 

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Ici au centre, François Piazza pose, vigoureux pilier gauche du RCC qu'il est.

Pourtant, tout ne fut pas simple. Lors de ses débuts, le rugby n'est pas beaucoup implanté pour les Juniors, et c'est face aux institutions franciliennes, le PUC ou le Racing, ainsi que d'autres clubs tels que St Maur qu'il croise le fer. « On dit que le rugby c'est l'école de la vie » assène l'homme. « Nous n'avions pas d'entraîneurs, donc c'était un peu le rugby par la démerde, mais ça nous allait bien. On prenait beaucoup de plaisir, on chantait beaucoup, que l'on gagne ou que l'on perde, et c'est comme cela que nous avons grandi ». Le regard devient brillant, les larmes montant. « Beaucoup de copains sont partis, et ça me fait toujours pareil. Lorsque l'un d'entre nous part, je leur fait un petit trophée en bois avec les insignes du club, pour le souvenir, pour que la chaîne ne soit pas rompue ».

Après 20 ans de bons et loyaux services à la pile, côté gauche, il raccroche les crampons et franchit la barrière pour devenir dirigeant du club, voulant faire honneur à Félix Jouve et Maurice Senez, les deux hommes à l'origine du rugby compiégnois, et dont les deux noms reviennent sans cesse dans la bouche de François Piazza. Commence une carrière dévouée à ce sport et enrichie de nombreux titres et décorations aussi méritées les unes que les autres.

« El Padre »

Entre autre secrétaire de la Commission Rugby de 68 à 72, Secrétaire du RC Compiègne de 72 à 86, secrétaire de de la Délégation Régionale de Picardie de 86 à 90, président du Comité de l'Oise de 94 à 99, membre du Comité Régional d'Ile de France de 88 à 2000… les différentes fonctions occupées par François Piazza ont fait de lui un personnage incontournable du rugby de la région. Un statut loin d'être volé, car si l'homme a connu de grosses responsabilités, il a toujours su faire de son mieux pour porter ce sport qui lui est si cher aussi haut qu'il le pouvait. Résultat, reconnu par tous, il a reçu pas moins de 20 décorations honorifiques, même si une en particulier le rend très fier. Au revers de son veston, l'homme nous montre un sourire convaincu au bord des lèvres, la médaille d'or de la Jeunesse et des Sports, un petit objet si lourd de sens pour lui.

Fin de l'entretien. Dehors, les enfants poursuivent leurs exercices avec les Ambassadeurs, et, la casquette à nouveau vissée sur le crâne, François Piazza s'approche de l'aire de jeu, le regard chaleureusement porté vers la tribune à laquelle nous faisons face. Un autre immense honneur pour lui, car cette tribune, où se pressent les supporters du RCC le dimanche pour assister aux joutes de Fédérale 2, porte son nom. Un juste retour des choses pour un homme qui avoue sans détour que le ce club, hormis sa femme et sa descendance bien entendu, n'est rien d'autre que toute sa vie. « Ici, tout le monde m'appelle El Padre, le père, ça veut dire que je leur ai laissé quelque chose ! ».
 

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Sur le bord de la pelouse du stade Félix Jouve - Maurice Senez, le Padre observe les jeunes pousses du club, futurs porte-drapeaux du RCC un club qui est toute sa vie.

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