Publié le 12/11/2010
On parle souvent de « famille » lorsque l'on évoque le rugby, est-ce une notion exacte pour vous, et qu'est-ce que cela représente pour vous ?
J'ai connu cela avec ma génération, et je pense, et je souhaite que cela soit toujours le cas aujourd'hui. Le rugby est le sport collectif par excellence. On dépend tellement de l'autre pour que cela fonctionne, de l'esprit fraternel de l'équipe et de son environnement, que ça ne peut pas changer. S'il n'y a pas de complémentarité, de solidarité, ça ne peut pas marcher. Lorsque je jouais à Lourdes et avec le XV de France sous l'ère Fouroux, c'était le leitmotiv, il y avait un véritable esprit de famille. Il faut que les gens s'aiment car les équipes ne se construisent que par le partage.
Vous avez dit que vous considériez Nicolas Mas un peu comme votre héritier, pouvez-vous m'en parler ?
Son vrai père spirituel s'appelle Didier Sanchez à l'USAP. Mais j'ai « adopté » Nicolas Mas la première fois que je l'ai rencontré. Il devait avoir une vingtaine d'années quand je l'ai vu pour son premier match, ce devait être un Perpignan – Toulouse, et Olivier Saïsset qui entrainaît l'USAP m'avait demandé ce que j'en pensais. Il avait le gabarit type du pilier, mais avec des choses en plus, dont une belle mobilité, et surtout encore beaucoup de choses à apprendre. Mais ça ne suffisait pas, car il y a toujours eu d'excellents piliers de 20 ans, avec par exemple Armary ou Califano, mais sans travail, ils n'évoluent pas. Aussi, voir un tel potentiel et une telle marge de progression laissait rêveur.
Que représente-t-il en tant qu'homme ?
C'est un garçon gentil, respectueux, et avec l'œil toujours pétillant. Mais il a un trait de caractère qui peut ne pas être visible lorsqu'on le voit de l'extérieur, c'est un caractère bien trempé qui fait qu'il ne lâche jamais rien, et il n'hésite pas à se remettre en question pour avancer. Le meilleur exemple est lorsqu'il a eu son hernie discale en 2005 qui l'a éloigné des terrains durant 6 mois. Il n'a jamais baissé les bras, il a travaillé, fais le dos rond pour revenir au top et il est revenu. C'est une force tranquille. Comme tous les piliers, il ne s'extériorise pas, il travaille en discrétion, car le monde de la première ligne est très particulier, il se vit, ne s'explique pas. Il est respectueux, ne s'enflamme pas, mais c'est un pilier vacciné, redoutable. Il a le sourire naturel, mais il n'en pense pas moins.
En tant que joueur ?
Un pilier est avant tout un homme fort du pack. Il l'est, mais il peut faire encore plus. Il a été champion de France, comme capitaine en plus, et ce n'est pas un hasard d'être le capitaine de l'USAP, on ne l'est pas que sur le terrain. On s'appuie sur lui, avant, pendant, après, mais il doit faire encore plus, devenir le papa du huit de devant. C'est un garçon talentueux, agréable, qu'il confirme.
Comment s'est traduite votre influence sur lui, l'avez-vous rencontré, conseillé ?
Je connais très bien Didier Sanchez qui s'occupe des « gros » à Perpignan, et avec qui je fais partie de l'Académie des premières lignes, fondée par Didier Retière. J'étais, par lui, une sorte de relais. J'ai en tête l'image de Nicolas qui explose sur une mêlée à Biarritz face à Barcella et qui monte comme un bouchon de champagne… ça arrive, tout le monde a des absences, et je l'avais dit à Didier Sanchez, pour l'aider, le faire avancer, pourquoi il avait explosé, comment ne plus le faire. Je suis heureux de pouvoir transmettre quelque chose, passer un témoin, comme cela a été le cas pour moi, et j'en suis d'autant plus fier que c'est avec un garçon comme Nicolas Mas. Vous ne pouvez pas vous imaginer la fierté que je peux ressentir.
Comment, lui, vous considère-t-il ?
C'est comme si c'était un élève, mais je ne peux pas vous dire ce qu'il en pense, il faudra lui demander. Il y a toujours eu des références chez les joueurs, moi ce fut Robert Paparemborde, qui s'est pris d'amitié pour moi, m'a transmis des choses, et j'essaie simplement de le faire à mon tour.
Si vous ne deviez lui dire qu'une chose, que lui diriez-vous ?
Carpe Diem ! Qu'il profite pleinement du moment présent, sans oublier d'où il vient et en restant toujours aussi humble qu'il ne l'est aujourd'hui.
On parle souvent de « famille » lorsque l'on évoque le rugby, est-ce une notion exacte pour vous, et qu'est-ce que cela représente pour vous ?
Le rugby me fait effectivement penser à une famille car lorsqu'on vit des épreuves difficiles, on trouve toujours quelqu'un pour nous épauler. On se connaît, on tisse des liens très forts avec certains joueurs. Je comprends que certains puissent dire qu'il s'agit d'une « deuxième famille ». Je côtoie certains coéquipiers depuis plus de 10 ans ; certains étaient même avec moi lorsqu'on était jeunes joueurs à l'école de rugby. On partage les évènements de la vie de chacun. Personnellement, j'ai appris à considérer le rugby de haut-niveau comme un métier. Je me suis construis une carapace car comme dans toute entreprise, il y a des gens que vous allez trouver et qui ne sont pas très corrects. Il est certain qu'il y a quelques décennies, le lien familial dans le rugby était bien plus fort.
Jean-Pierre Garuet dit de vous que vous êtes son héritier, comment prenez-vous ce compliment ?
C'est un grand honneur que cet homme me dise cela. Il a marqué sa génération et il apporte beaucoup au poste de pilier avec l'Académie des piliers créée avec Didier Retière. Mais savoir cela me met aussi la pression.
A l'inverse, le considérez-vous comme un modèle ?
Oui, avec Pascal Meya. Celui-ci est comme un frère pour moi. Il m'a guidé et il existe un vrai lien du rugby. Je reste en rapport constant avec Pascal Meya, on s'appelle tous les jours et c'est quelqu'un qui compte énormément pour moi. Quand j'ai débuté à l'USAP, il était là. Il a la tête sur les épaules et le rugby n'a été qu'un prétexte pour nous connaître, mais si je l'avais rencontré au supermarché il y aurait eu la même chose entre nous. Il m'a constamment épaulé et il m'aide à me construire en tant qu'homme.
Que représente Jean-Pierre Garuet en tant qu'homme ?
C'est quelqu'un de vrai, de sain.
En tant que joueur ? Comment s'est traduite son influence dans votre approche de ce sport ? Dans ton évolution ?
Il est un exemple par sa carrière et son apport au poste de pilier. Son Académie prouve qu'il est toujours à la recherche de la transmission de son savoir. Et qu'il a une passion pour notre poste. C'est grâce à des gens qui sont aussi réglos que lui que le rugby a encore de vraies valeurs.
Si vous ne deviez lui dire qu'une chose, que lui diriez-vous ?
Je lui parle quasiment tous les jours…mais je le remercierais pour ce qu'il apporte au rugby…